Passe ton BAC d'abord !

Combien de fois l’ai je entendue cette litanie parentale ?

« Passe ton BAC d’abord ! Bon, maintenant que t’as ton bac, passe ton diplôme de médecine d’abord !  Bon, t’as raté médecine…et bah passe un autre diplôme d’abord ! »

Aujourd’hui que je suis parent, je comprends la peur des miens. L’envie sécuritaire qui me fait projeter mes enfants dans un monde où ils seraient maîtres de leur destin en possédant le seul pouvoir qui leur assurera la fondation de ma dynastie : la situation.

« Ah il a une bonne situation, il est notaire ! » Entendez  « il gagne de l’argent ».

On entend rarement : « Ah il a une bonne situation, il est artiste ! »

Ou bien l’artiste en question a écrit de grandes choses, a fait de grands films, a posé dans des magazines ou plus vraisemblablement est issu d’une émission de téléréalité.

Parfois il arrive que l’enfant, passionné et épaulé, aille au bout de son rêve et devienne vraiment pompier, danseuse étoile ou cosmonaute. 

Mais je vois mal mon fils me dire un jour :

«  -  Papa, quand je serai grand, je veux travailler dans un bureau, avoir un patron qui comprend rien à ce que je fais, quelques salariés à manager histoire de jouir d'un petit pouvoir et des objectifs commerciaux inatteignables à atteindre !

- Passe ton bac d’abord ! »

Le piège réside aussi dans la projection des rêves des parents.

Mon père, homme de chiffres, rêvait de faire de l’hôtellerie…il  a eu beaucoup de mal à me transmettre sa passion. Surtout qu’il m’avançait comme argument qu’un jour je serai patron d’un grand palace. Je pourrais donc leur offrir une suite à l’œil. Avouez qu’il y a plus motivant comme rêve à transmettre.

Et moi, et bien...j’aurais voulu être un artiste (oui je sais, pouvoir faire mon numéro, quand l’avion se pose sur la piste et tout le toutim).

Mais si le rêve de mon fils est de devenir comptable, il faut que je pense à ne pas le forcer à devenir artiste.

crédit photo : Steven Myers